3-29 décembre 1989
Tchécoslovaquie. Formation d'un gouvernement pluraliste, Václav Havel président de la République
Le 3, Ladislav Adamec présente son nouveau gouvernement au président de la République, Gustáv Husák : seize des vingt et un membres sont communistes. L'opposition, menée par le Forum civique, le rejette immédiatement comme non représentatif, et donne une semaine au pouvoir pour en former un autre, menaçant d'appeler à la grève générale.
Le 4, les pays du pacte de Varsovie, dont les dirigeants sont réunis à Moscou autour de Mikhaïl Gorbatchev après le sommet de Malte, condamnent l'intervention militaire du 21 août 1968 en Tchécoslovaquie, qui avait déjà été dénoncée par les Parlements hongrois, polonais et est-allemand.
Le 7, Ladislav Adamec démissionne, refusant de diriger un cabinet de coalition comme l'exige l'opposition. La tâche de former le gouvernement est confiée à Marian Calfa, membre du P.C.T. et ministre depuis 1987. Dès le lendemain, au terme de négociations avec l'ensemble des forces politiques du pays, il accepte que le P.C.T. n'y détienne pas la majorité des portefeuilles. C'est la première fois depuis quarante et un ans que le pays aura un gouvernement pluraliste.
Le 10, peu après la présentation du cabinet d'« entente nationale », dans lequel le P.C.T. ne compte que dix ministres sur vingt et un, Gustáv Husák, reconnaissant « les erreurs et les déviations du passé », renonce à la présidence de la République. Sa démission était aussi réclamée par le Forum civique. Lorsque Václav Havel paraît sur la place Venceslas, la foule acclame tout autant un candidat potentiel à la fonction présidentielle que le dirigeant du Forum civique qui a réussi, en trois semaines, à faire tomber un régime qu'elle subissait depuis vingt ans.
Le 11, tandis que, dans une certaine confusion, des négociations s'engagent entre forces politiques pour la désignation d'un candidat unique de compromis à la présidence de la République, l'armée commence, à la frontière autrichienne, le démantèlement du rideau de fer barbelé dressé en 1953. Il faudra une semaine pour en venir à bout.
Les 20 et 21, le P.C.T. se réunit en congrès extraordinaire pour tenter d'éviter son anéantissement complet. Les deux hommes qui avaient entamé le dialogue avec l'opposition sont élus à sa tête : Ladislav Adamec devient président et Vasil Mohorita, ex-chef des Jeunesses communistes, est élu premier secrétaire.
Le 28, les trois cent vingt-trois membres des Parlements tchèque et slovaque, qui constituent l'Assemblée fédérale, élisent à l'unanimité Alexander Dubček à la présidence de cette dernière. Vingt et un ans après sa disgrâce, le dirigeant du Printemps de Prague, devenu jardinier à Bratislava, prend ainsi sa revanche sur l'histoire.
Le 29, l'Assemblée élit, toujours à l'unanimité, Václav Havel président de la République. Le dramaturge et ancien dissident avait été désigné, le 22, sous la pression populaire, pour être le candidat unique de l'ensemble des partis politiques, y compris du P.C.T. Félicité par de nombreux dirigeants occidentaux, mais aussi par le ministre soviétique des Affaires étrangères, le nouveau chef de l'État salue la foule massée dans la cour du château de Prague, au cours d'une cérémonie d'intronisation qui prélude à une liesse populaire qui durera une grande partie de la nuit.