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3-31 décembre 1995

France. Concessions du gouvernement et fin des grèves sur fond d'insatisfaction des partenaires sociaux

Le 3, le ministre de l'Éducation nationale, François Bayrou, présente son quatrième plan depuis six semaines que dure le mouvement étudiant. Ce plan prévoit une rallonge budgétaire de 369 millions de francs destinée aux universités les moins dotées ; la création de deux mille postes d'enseignant supplémentaires ; un programme de travaux de sécurité dans les bâtiments universitaires de 2 milliards de francs ; enfin, une loi de programmation budgétaire qui doit être établie à l'issue des « états généraux » sur l'Université déjà annoncés. Les organisations étudiantes jugent ces propositions insuffisantes.

Le 5, le Premier ministre défend, à l'Assemblée nationale – où une motion de censure déposée par l'opposition de gauche non communiste est rejetée – puis à la télévision, son plan de réforme de la Sécurité sociale présenté en novembre et qui a déclenché un mouvement de protestation chez les fonctionnaires. Alain Juppé propose toutefois une « concertation » sur les régimes spéciaux de retraite, qu'il affirme ne pas vouloir aligner sur le régime général. Le même jour, tandis que la grève reste très suivie dans les services publics, plus de cinq cent mille personnes manifestent, à travers le pays, à l'appel de la C.G.T. et de F.O..

Le 7, environ un million de manifestants défilent à Paris et en province à l'appel de la C.G.T., de F.O., de la F.E.N. et de la F.S.U. (enseignants). Le même jour, Alain Juppé nomme un médiateur dans le conflit qui oppose le gouvernement aux cheminots au sujet du contrat de plan État-S.N.C.F. présenté en novembre.

Le 7 également, lors du sommet franco-allemand de Baden-Baden, le chancelier Helmut Kohl approuve les « efforts de consolidation budgétaire et de réduction des déficits publics » du gouvernement français. De son côté, la Banque de France prend l'initiative de réduire légèrement ses taux directeurs, marquant ainsi son appui à la politique gouvernementale.

Le 9, le gouvernement, mécontent de la façon dont la presse rend compte du plan Juppé, lance une campagne de publicité, « Connaissez-vous le plan Juppé? », dans les journaux nationaux et régionaux.

Le 10, sur France 2, le Premier ministre, qui se dit prêt à « négocier » avec les syndicats, annonce la suspension des travaux de la commission chargée d'étudier la réforme des régimes spéciaux de retraite ainsi que le report sine die de la signature du contrat de plan État-S.N.C.F. Il indique que le personnel roulant de la S.N.C.F. pourra continuer à faire valoir ses droits à la retraite à cinquante ans. Enfin, il annonce la tenue d'un « sommet social » sur l'emploi. Le même jour, il engage devant l'Assemblée nationale la responsabilité de son gouvernement sur l'adoption du projet de loi d'habilitation qui l'autorise à légiférer par voie d'ordonnances au sujet de la réforme de la Sécurité sociale. Ce projet de loi sera adopté le 20.

Le 12, un million de personnes selon la police, deux millions selon les organisations syndicales, manifestent à travers la France à l'appel de la C.G.T., de F.O. et de la F.S.U.

Le 13, en Conseil des ministres, le président Chirac, qui était resté silencieux depuis le début des mouvements sociaux, déclare qu'il fait « confiance au gouvernement pour conduire cette politique tout simplement parce qu'il n'y en a pas d'autre ». La capacité du Premier ministre à faire face au conflit social commençait à être mise en cause au sein de la majorité, et jusqu'au R.P.R.

Le 14, le trafic reprend très partiellement à la R.A.T.P. Tandis que la C.G.T. continue à réclamer le « retrait » du plan Juppé et que F.O. exige toujours une « négociation globale », la secrétaire générale de la C.F.D.T., Nicole Notat, critiquée par sa base, appelle à la reprise du travail. Les jours suivants, la reprise se confirme dans les transports ainsi que dans les autres services publics.

Le 16, six cent mille personnes selon la police, deux millions selon les organisations syndicales, défilent dans les rues de Paris et des grandes villes de province, à l'appel de la C.G.T., de F.O. et de la F.S.U. Les syndicats invitent leurs adhérents à poursuivre le mouvement sous une autre forme que la grève. Dans les universités, où le mouvement étudiant s'est essoufflé, les cours reprennent progressivement.

Le 17, les médecins libéraux manifestent à Paris, à l'appel de leurs syndicats, contre le « rationnement des soins ». Le même jour, sur T.F. 1, Alain Juppé déclare « assumer la responsabilité » du conflit social et assure les grévistes de sa « compréhension ». Au sujet de la réforme de la Sécurité sociale, il déclare qu'il y a « un immense champ pour la discussion et la négociation au cours des six prochains mois ».

Le 20, le Conseil des ministres nomme Loïk Le Floch-Prigent, président de Gaz de France, à la tête de la S.N.C.F. en remplacement de Jean Bergougnoux, qui avait démissionné le 15. En novembre, Alain Juppé avait dénoncé la « mauvaise communication » régnant au sein de la société de transports ferroviaires.

Le 21 se tient, à Matignon, le sommet social sur l'emploi qui réunit les partenaires sociaux autour du gouvernement. Alain Juppé présente des mesures visant à relancer la consommation, à favoriser l'emploi des jeunes et à accélérer les discussions sur la réduction du temps de travail. Les syndicats comme le patronat jugent ces mesures insuffisantes.

Le 31, lors de la présentation télévisée de ses vœux aux Français, Jacques Chirac déclare vouloir tirer les « leçons » des mouvements sociaux. Il reconnaît l'existence d'« inquiétudes » et d'un « manque de confiance dans des pouvoirs [...] éloignés des réalités quotidiennes ». « On ne changera pas la France sans les Français », affirme-t-il, tout en rendant hommage au Premier ministre. Enfin, il déclare que « les espoirs que [son] élection a fait naître [...] ne seront pas déçus ».

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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