30 janvier-5 février 2004
France. Condamnation d'Alain Juppé dans l'affaire du financement du R.P.R
Le 30, le tribunal correctionnel de Nanterre (Hauts-de-Seine) condamne Alain Juppé, président de l'U.M.P., à dix-huit mois de prison avec sursis dans l'affaire du financement illégal du R.P.R. Cette peine entraîne une inéligibilité de cinq ans, qui est doublée en application du Code électoral. L'ancien secrétaire général du mouvement néo-gaulliste et ancien adjoint aux finances de la Mairie de Paris est reconnu coupable de « prise illégale d'intérêts » pour avoir fait rémunérer, entre 1988 et 1995, des personnels de son parti par des entreprises et par la Ville de Paris, pour un montant estimé à plus de 2,4 millions d'euros. Le jugement estime qu'Alain Juppé, alors « investi d'un mandat électif public », a « trompé la confiance du peuple souverain ». Il relève que celui-ci était alors « directement subordonné au président du mouvement », Jacques Chirac, à l'époque maire de Paris. Un rapport d'enquête de la police judiciaire affirmait que l'on pouvait « présumer la connaissance du mécanisme incriminé par l'actuel chef de l'État ». D'autres dirigeants du R.P.R. sont condamnés à des peines de prison avec sursis, dont l'intendante du parti, Louise-Yvonne Casetta, et les deux anciens trésoriers, Robert Galley et Jacques Boyon, ainsi que treize chefs d'entreprise.
Le 31, la présidente de la chambre correctionnelle, Catherine Pierce, fait état, dans la presse, de multiples pressions et menaces qui auraient visé à connaître à l'avance la décision du tribunal.
Le 1er février, Jacques Chirac demande au gouvernement de confier une enquête administrative sur ce sujet aux premiers présidents de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, et au vice-président du Conseil d'État. Cette initiative, comme celle du président de l'Assemblée, Jean-Louis Debré, de créer une mission d'information parlementaire, sera critiquée par l'opposition socialiste et par l'U.D.F., qui dénoncent l'atteinte au principe de séparation des pouvoirs et la mise à l'écart du Conseil supérieur de la magistrature (C.S.M.).
Le 3, Alain Juppé, qui a annoncé le 13 janvier son intention de quitter la vie politique en cas de condamnation à une peine le rendant inéligible, s'exprime dans le cadre du journal télévisé de T.F.1. Il annonce sa décision de faire appel du jugement du tribunal, de conserver ses mandats de maire de Bordeaux et de député de la Gironde jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel, qui doit intervenir dans un délai de neuf à douze mois, et de rester à la présidence de l'U.M.P. jusqu'au congrès de cette formation prévu pour l'automne.
Le 5, le C.S.M. publie un communiqué – démarche exceptionnelle – dans lequel il « regrette de ne pas avoir été consulté avant la création d'une commission administrative sur des faits qui font l'objet d'une information judiciaire ».
Le 8 mars, la commission d’enquête administrative remettra son rapport au Premier ministre. Selon elle, les magistrats qui ont jugé Alain Juppé n’ont subi aucune « pression susceptible d’influencer leur décision ».
Le 30 avril, le C.S.M. transmettra au chef de l’État un avis identique.