4-23 novembre 1990
France. Déblocage de crédits pour les lycéens
Le 4, François Mitterrand adresse à la conférence nationale du Mouvement des jeunes socialistes, réunie à Istres (Bouches-du-Rhône), un message invitant « quiconque exerce des responsabilités » à être attentif aux attentes des jeunes « qui doivent être entendus ». Cette demande intervient à la veille d'une semaine où va reprendre l'agitation lycéenne entamée en octobre, puis interrompue par les vacances de la Toussaint. Ce mouvement lycéen exprime surtout l'exaspération d'une jeunesse essentiellement banlieusarde et provinciale devant l'insécurité et l'insuffisance de moyens dont souffre l'éducation nationale, voire l'angoisse de déboucher désarmé sur le marché du travail.
Le 5, le jour même où les députés discutent au Palais-Bourbon le budget 1991 de l'éducation nationale, environ cent mille lycéens manifestent dans les grandes villes, à Paris et en Province. Dans la capitale, ils sont environ vingt mille à défiler, mais les consignes de modération données aux forces de l'ordre sont mises à profit par des « casseurs » qui brisent quelques vitrines et brûlent un kiosque à journaux.
Du 6 au 9, les manifestations se renouvellent quotidiennement en s'amplifiant dans les villes moyennes. Les deux coordinations qui se partagent la direction du mouvement, la Fédération indépendante et démocratique lycéenne, proche de S.O.S.-Racisme, et celle qui regroupe les Jeunesses communistes, les trotskistes et le courant Socialisme et République du P.S., s'accordent pour organiser une grande démonstration de masse, le 12, à laquelle acceptent de se joindre la F.E.N. et la plupart des organisations d'enseignants et de parents d'élèves.
Le 12, cent mille lycéens participent à Paris à une « marche nationale pour l'éducation », tandis que deux cent mille autres manifestent dans les villes de province. Mais, à Paris, des magasins sont pillés, et des heurts violents se produisent avec les forces de l'ordre barrant les ponts sur la Seine. Une centaine de policiers sont blessés, une centaine de voitures détruites ou endommagées, quatre-vingt-onze interpellations opérées. Le président de la République reçoit à l'Élysée une délégation de lycéens, tandis que Lionel Jospin, qui assure l'intérim du Premier ministre parti pour le Japon, annonce un « plan d'urgence » en faveur des lycées.
Le 14, le gouvernement décide que 4,5 milliards de francs seront débloqués pour financer le plan d'urgence pour les lycées, tandis que, le 15 et le 16, des négociations s'engagent entre le ministre de l'Éducation nationale et les coordinations lycéennes sur la répartition de ces crédits ainsi que sur les moyens d'accélérer l'aménagement des locaux et d'élargir les droits des élèves dans leurs établissements. Les jours suivants, les propositions concrètes du gouvernement, les craintes de nouvelles violences et la méfiance vis-à-vis d'une politisation croissante du mouvement ont raison de l'agitation spontanée : les tentatives pour organiser de nouvelles manifestations sont des échecs.
Le 23, le Conseil national des programmes remet ses propositions à Lionel Jospin pour la réforme des lycées qui doit être décidée avant six mois. Son rapport propose d'importants changements dans l'organisation pédagogique et le contenu des programmes des classes de seconde, première et terminale. Lionel Jospin engage la concertation autour de ces propositions.