5-20 juillet 1988
France. Premières difficultés de l'« ouverture »
Le 5, sur ordre du ministère de la Justice, il est mis fin à l'isolement systématique des détenus « politiques ». Cette décision, connue le même jour, alors que commence à l'Assemblée nationale le débat sur le projet de loi d'amnistie, suscite une tempête politique, l'opposition dénonçant le « cadeau » fait aux terroristes. Le ministre de la Justice, Pierre Arpaillange, que sa carrière de haut magistrat avait jusqu'alors tenu à l'écart des joutes politiciennes, se justifie en avançant des motifs humanitaires.
Mais il est désavoué par Michel Rocard, qui annonce, le 6, que l'isolement pourra être maintenu « à l'égard de ceux des détenus qui sont poursuivis pour des crimes de sang ». Entre-temps, à l'aube du 6, Pierre Arpaillange est parvenu à faire adopter par l'Assemblée son projet de loi d'amnistie, mais au prix de concessions au Parti communiste, qui a obtenu que soit prévue la réintégration dans l'entreprise des délégués syndicaux licenciés.
Le 7, Michel Rocard est contraint de se séparer d'un autre membre de son gouvernement, représentant lui aussi de la « société civile », le professeur Léon Schwarzenberg, ministre délégué à la Santé, qui avait suscité un tollé en annonçant, le 5, sans aucune concertation, plusieurs mesures spectaculaires qu'il souhaitait prendre : création d'un carnet de santé pour les malades hospitalisés, dépistage systématique du S.I.D.A. pour les femmes enceintes et les opérés, distribution de drogue aux malades toxicomanes.
Le 8, seuls les députés de gauche votent le texte définitif de la loi d'amnistie. Des parlementaires R.P.R. et U.D.F. saisissent le Conseil constitutionnel, qui, le 20, leur donne raison en excluant du droit à la réintégration les représentants du personnel licenciés et condamnés pour « fautes lourdes ».
Le 14, jour de la fête nationale, François Mitterrand est interrogé par Yves Mourousi sur T.F.1. Semblant mettre un coup d'arrêt à l'ouverture, le chef de l'État invite le gouvernement à prendre appui sur la « majorité de gauche » qui a gagné les élections.