5-29 octobre 1988
Algérie. Émeutes, répression et annonce de mesures de démocratisation
Le 5, protestant contre la cherté des produits de première nécessité et la pénurie chronique de semoule, aliment de base de la population, des centaines de jeunes, écoliers, lycéens et chômeurs, déferlent dans les rues du centre d'Alger et saccagent tout sur leur passage, choisissant de préférence des bâtiments publics ou symbolisant l'opulence, comme l'agence d'Air-Algérie ou le ministère du Commerce. L'armée tire sur les émeutiers faisant plusieurs morts et de nombreux blessés.
Le 6, l'agitation reprend et l'état de siège est décrété à Alger : des chars patrouillent dans les rues et des hélicoptères survolent la ville.
Les 7 et 8, les troubles s'étendent à de nombreuses villes. Des militants islamistes, réclamant plus de justice sociale, manifestent à leur tour dans les rues de la capitale, demandant l'instauration de la loi islamique. L'armée tire sur la foule à la sortie d'une mosquée, faisant de nombreux morts.
Plusieurs manifestations contre la dictature en Algérie ont lieu à Paris et à Marseille les jours suivants.
Le 10, le président Chadli Bendjedid prononce une allocution télévisée où il annonce de prochaines réformes politiques et reconnaît les déficiences du gouvernement. Peu de temps avant son intervention, l'armée tire sur les manifestants dans le quartier algérois de Bab-el-Oued, causant la mort de trente personnes. Le bilan officiel est de cent soixante et un morts, mais, selon d'autres sources, on compterait plus de cinq cents morts et un nombre considérable de blessés. En France comme à l'étranger, les autorités font preuve de discrétion sur les événements algériens : ainsi Roland Dumas, ministre français des Affaires étrangères, déclare, le 12, qu'il est trop tôt pour porter un jugement.
Le 12, le calme revient à Alger, où l'état de siège est levé, tandis que des produits alimentaires font leur apparition en abondance dans les magasins. Le président Chadli annonce une modification de la Constitution pour démocratiser la vie politique qui sera soumise à un référendum le 3 novembre.
Le 15, à Paris, le Comité des droits de l'homme et des libertés en Algérie organise une manifestation pour réclamer l'arrêt de la répression en Algérie, où les arrestations se poursuivent et où la délation est encouragée ; des cas de torture sont également dénoncés.
Le 24, le président Chadli rend publiques les lignes directrices des réformes politiques qui feront l'objet d'un second référendum après discussion par le parti unique. Il déclare qu'il n'est « pas possible d'établir le multipartisme », mais que « tous les courants et les sensibilités pourront s'exprimer au sein du F.L.N. qui sera ouvert » à tous les citoyens. En outre, les organisations sociales et professionnelles ne seront plus contrôlées par le parti.
Le 29, Mohamed Cheriff Messaasia, numéro deux du F.L.N. et responsable du secrétariat permanent du comité central du parti, qui avait cristallisé sur sa personne tous les mécontentements populaires, est limogé ainsi que le général Lakhal Ayat, chef de la sécurité militaire.