5-29 septembre 1994
Algérie. Élargissement des chefs historiques de l'ex-F.I.S., tension en Kabylie et assassinat du chanteur Cheb Hasni
Le 5, la présidence confirme la réception, à la fin d'août, des deux premières lettres adressées au président Liamine Zéroual par le président emprisonné de l'ex-Front islamique de salut (F.I.S.) Abassi Madani, dans lesquelles celui-ci évoque « l'éventualité d'une trêve mettant fin à la violence de l'État et des groupes armés, si les conditions sont remplies par le pouvoir en vue d'un dialogue sérieux ». Abassi Madani exige la levée de l'état d'urgence, une amnistie générale, l'arrêt de la répression visant les islamistes, le retour de l'armée dans les casernes et la mise en place d'un gouvernement neutre chargé d'organiser des élections. Il se dit prêt à participer au dialogue politique et à accepter les « constantes nationales » définies par le président Zéroual, parmi lesquelles le rejet de la violence comme moyen d'action politique. Il propose l'organisation d'un référendum sur la création d'un État républicain fondé sur les principes islamiques.
Le 13, les chefs historiques de l'ex-F.I.S., son président Abassi Madani et son vice-président Ali Benhadj, condamnés en juillet 1992 à douze ans de détention pour atteinte à la sûreté de l'État, quittent leur prison pour être placés en résidence surveillée. Trois autres responsables islamistes sont libérés. Le pouvoir explique son geste par sa volonté de permettre aux dirigeants de l'ex-F.I.S. d'« apporter leur concours [...] à l'arrêt de la violence [...], à la restauration de la sécurité et à la consolidation de la stabilité dans le respect de la légalité ».
Le 21, les grandes villes de Kabylie sont paralysées à la suite de l'appel à la grève générale lancé par le Mouvement culturel berbère (M.C.B.), qui exige la reconnaissance du berbère comme langue officielle.
Le 25, le très populaire chanteur berbère Matoub Lounes est enlevé près de Tizi Ouzou. Le M.C.B. menace les islamistes, ravisseurs présumés du chanteur, d'une « guerre totale » si celui-ci n'est pas libéré.
Le 26, les autorités annoncent que Cherif Gousmi, chef du Groupe islamique armé, a été tué par les forces de l'ordre dans la région d'Alger.
Le 28, les deux principaux partis à dominante kabyle, le Front des forces socialistes d'Hocine Aït Ahmed et le Rassemblement pour la culture et la démocratie de Saïd Sadi, qui ne participent pas au dialogue national, sont reçus à la présidence. Le lendemain, le gouvernement annonce l'organisation prochaine d'une Rencontre nationale sur la langue berbère.
Le 29, l'idole de la musique raî Cheb Hasni est tué à Oran. Il est le premier musicien assassiné depuis le début des violences, en février 1992. La musique est l'art le plus populaire en Algérie. Ses obsèques, le lendemain, donnent lieu à une grande manifestation en faveur de la démocratie.