9-31 août 1982
France. Graves attentats à Paris et mesures antiterroristes
Le 9, deux hommes armés de pistolets mitrailleurs lancent une grenade puis ouvrent le feu dans le restaurant juif Goldenberg, rue des Rosiers, à Paris (IVe). Ils s'enfuient en courant tout en continuant de tirer. Six personnes sont tuées, vingt-deux autres blessées. Cet attentat est condamné unanimement. Après Pierre Mauroy, qui se rend sur les lieux, François Mitterrand et Gaston Defferre assistent le soir même à une cérémonie dans la synagogue de la rue Pavée (IVe). Le chef de l'État est accueilli par des cris hostiles. Les représentants de plusieurs organisations juives critiquent violemment la politique française au Proche-Orient et rendent la presse et la télévision responsables du climat antisémite et antisioniste qui régnerait, selon eux, en France depuis le début de la guerre au Liban. De son côté, Yasser Arafat, chef de l'O.L.P., exprime dans un message au président Mitterrand, son « indignation » et sa « condamnation nette et totale ». L'attentat, non revendiqué, serait l'œuvre de dissidents palestiniens du groupe Abou Nidal.
Le 10, à Jérusalem, le Premier ministre israélien, Menahem Begin, menace d'appeler « la jeunesse de notre peuple en France à défendre la vie des juifs et leur dignité ». Cette intervention provoque des réactions négatives aussi bien dans la classe politique française que dans la communauté juive elle-même.
Dans la nuit du 10 au 11, une bombe explose rue de la Baume à Paris (VIIIe) devant un immeuble abritant une société d'importation d'agrumes en provenance d'Israël. Une passante est blessée. L'opération est revendiquée par l'organisation Action directe qui avait commis ces dernières semaines plusieurs attentats contre des cibles israéliennes en France.
Le 11, un véhicule piégé explose devant un bâtiment de l'ambassade irakienne à Paris (XVIe). Cette action, qui fait cinq blessés légers, est revendiquée par une organisation d'opposition shi'ite irakienne, le Mouvement de l'action islamique d'Irak, proche des autorités iraniennes.
Le 12, Jacques Chirac, maire de Paris et président du R.P.R., qui immédiatement après l'attentat de la rue des Rosiers avait estimé que Paris était devenu « le champ clos de tous les terrorismes », annonce qu'il « soutiendra sans réserve » toute mesure efficace contre le terrorisme.
Le 14, un incendie criminel détruit un oratoire israélite à Paris (XIe). Cet attentat est attribué par les enquêteurs à un « déséquilibré ».
Le 17, François Mitterrand, dans un entretien télévisé, justifie sa politique « de présence, d'équilibre et de paix » au Proche-Orient et annonce la mise en œuvre d'un dispositif antiterroriste.
Le 18, le Conseil des ministres précise les mesures annoncées la veille par le chef de l'État. Un secrétariat d'État à la sécurité publique est créé sous la responsabilité de Joseph Franceschi, jusque-là secrétaire d'État aux personnes âgées, qui assurera la direction effective des services de la police nationale. Le commandant de gendarmerie Christian Prouteau, nommé le 25 conseiller technique à l'Élysée, se voit confier une mission « de coordination, d'information et d'action contre le terrorisme ». Un office central pour la répression des trafics d'armes et d'explosifs est créé, ainsi qu'un fichier central international informatisé du terrorisme. D'autre part, le Conseil des ministres décide la dissolution du groupe Action directe et prévoit un contrôle plus sévère de la délivrance des visas et de l'activité des diplomates étrangers soupçonnés d'activités illicites. La création d'un tribunal européen est également envisagée.
Le 19, un attentat à l'explosif provoque d'importants dégâts matériels dans les locaux de l'hebdomadaire Minute à Paris (XVIe). Il est revendiqué par Action directe.
Le 21, deux artificiers sont tués, alors qu'ils tentaient de désamorcer un colis piégé, avenue de la Bourdonnais à Paris (VIIe). L'engin visait, selon toute vraisemblance, le véhicule, garé à cet endroit une heure plus tôt, de Roderick Grant, chargé commercial à l'ambassade des États-Unis. Ce nouvel attentat est revendiqué par les F.A.R.L. (Fractions armées révolutionnaires libanaises), déjà responsables, depuis le début de l'année, de l'assassinat de deux diplomates – un Américain et un Israélien – à Paris.
Le 28, un communiqué exceptionnel de l'Élysée annonce l'arrestation d'activistes appartenant « aux milieux du terrorisme international ». L'importance accordée à ces arrestations se révèle rapidement disproportionnée avec la stature réelle des terroristes, tous trois Irlandais et membres de l'organisation panmilitaire, Armée irlandaise nationale de libération (I.N.L.A.).
Le 29, Oreste Scalzone, ancien dirigeant de l'Autonomie italienne, est arrêté à Paris à la demande des autorités de son pays qui le soupçonnent d'avoir été mêlé à des activités terroristes. L'Italie, qui espère infléchir la politique française de droit d'asile, déjà ébranlée par le regain des attentats, réclame, le 31, son extradition.