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Nicolas Poussin (1594-1665), Le Jugement de Salomon. 1649. Huile sur toile. 1,01 m X 1,50 m. Musée du Louvre, Paris.Selon un de ses premiers biographes, l'érudit italien Giovan Pietro Bellori, Poussin tenait Le Jugement de Salomon pour son meilleur tableau. Il l'exécuta en 1649, dans sa pleine maturité.Le sujet est tiré de la Bible. Deux prostituées se présentent devant le jeune roi Salomon, au centre. Elles habitent la même maison, et chacune a un fils. Mais l'un des deux enfants est mort, et elles se disputent celui qui est resté vivant. Pour connaître la vérité, Salomon ordonne que l'on tranche en deux le corps de ce dernier. La vraie mère supplie alors le roi de laisser son enfant en vie, et l'abandonne à l'autre, alors que celle-ci est prête à accepter le partage. Salomon reconnaît ainsi la vraie mère et ordonne qu'on lui remette l'enfant.Poussin a poussé à l'extrême la symétrie de la composition : le groupe de Salomon et des deux femmes forme une pyramide dont le roi occupe le sommet, les personnages qui assistent à la scène sont également répartis de chaque côté, se détachant en frise sur le mur du fond comme dans un bas-relief antique. Chaque groupe se répond exactement. Ainsi, au geste de la femme située à l'extrême droite correspond celui du soldat à l'extrême gauche. Dans un premier dessin préparatoire, Poussin avait imaginé un Salomon colossal et un groupe central analogue à celui du tableau. L'assistance était répartie comme dans la version définitive, les soldats à gauche, les conseillers et les spectateurs du procès à droite. Mais le nombre des personnages n'est pas encore fixé, les gestes non plus, par exemple celui du soldat qui s'apprête à trancher le corps de l'enfant en deux. Et l'espace même de la composition est très différent : le trône s'inscrit dans un hémicycle, sorte de tribune où ont pris place de nombreux spectateurs. Dans une autre feuille, postérieure à la précédente, dont la partie centrale, parce que le dessin avait été déchiré, a été reprise et complétée par une autre main, Poussin a trouvé la composition presque définitive de son tableau. Seules quelques figures seront modifiées, ainsi à droite un soldat qui n'est pas repris dans le tableau, ou, à l'extrême gauche, un conseiller remplacé par un soldat. Dans ce dessin, les expressions sont nettement plus travaillées, ainsi que certains effets du décor, comme les ombres entre les colonnes et le mur.Poussin juxtapose dans ce tableau deux moments successifs de l'histoire qu'il raconte : l'ordre de partager le corps de l'enfant, et le verdict définitif. C'est ce que marque le geste de Salomon, qui vient de donner sa sentence, et qui rend en même temps l'enfant à sa véritable mère. Chacun des assistants exprime son sentiment par rapport à l'action principale : ainsi, dans le groupe de droite, l'horreur que suscite la fausse mère, mêlée de pitié envers la vraie, la stupeur devant les moyens employés pour connaître la vérité, l'admiration pour la sagesse du roi, inspiré par Dieu. Pour rendre sa narration plus efficace, Poussin n'hésite pas à risquer une invraisemblance : il représente dans les bras de sa mère l'enfant qui devrait être étendu, mort, sur le sol entre les deux femmes. Mais la composition gagne ainsi en équilibre.